Du sable et des ombres
Informations sur l'événement
À propos de cet évènement
Exposition ouverte sur rendez-vous du mercredi au samedi de 13h à 17h 30
En raison des mesures sanitaires, l'évènement est réservé aux professionnels : artistes plasticiens, collectionneurs, commissaires, galeristes.
L’exposition Du sable et des ombres fait le récit des désirs, des espoirs et des angoisses qui convulsent nos sociétés humaines en prise avec un environnement qui les dépasse. En tissant un ensemble d’errances et d’états transitoires, Du sable et des ombres ne propose pas de refuge, ni d’intérieurs protégés ; l’exposition s’ouvre sur la figure d’un voyageur en plein désert scrutant l’horizon au crépuscule, sans que l’on sache s’il agit du jour qui se lève ou du soir qui tombe. La solitude des espaces confinés laisse place à celle des vastes espaces trop grands pour soi, balayés par les vents et les intempéries, dans lesquels il nous faut s’orienter, construire, aimer, trouver du sens.
Cette logique de la navigation à vue, nous en faisons collectivement l’expérience au quotidien. Les démarches des quatre artistes témoignent de cette progression, des douleurs, des pertes et difficultés qu’elle implique, et ils révèlent sur leur passage les zones fécondes rencontrées. Ils nous font passer là où la vie danse et prolifère, là où elle dessine des motifs autrement plus complexes et inattendus que les quadrillages de la fatalité.
Dans sa vidéo Filer, Cécile Hadj-Hassan nous invite à la suivre : on aperçoit sa silhouette dans un champs s’éloigner lentement de nous, spectateur, pour disparaître dans le fond du paysage en laissant glisser derrière elle un fil d’Ariane. Figure ambiguë de guide, elle engage un geste de fuite, de dissolution du corps dans le bleu vague de l’horizon, où les contours du monde sont incertains. Sa série photographique Mémo, constituée de collisions de temporalités différentes, révèle la chimie labile du souvenir. Elle fait de notre mémoire, qui ne retient jamais qu’une forme pulvérisée du vécu, une zone suspendue, où le monde est à la fois en train de se faire et de disparaitre.
L’exposition est ponctuée par les photographies de Safouane Ben Slama, qui saisit des fragments de l’éternelle et transitoire expérience humaine. On découvre deux adolescents en plan rapproché, pris dans leur propre espace, qui entrelacent leurs bras et révèlent avec la sincérité de l’enfance l’intime et secrète proximité qui lie les êtres entre eux. Plus loin, sur une autre photographie, c’est un homme âgé qui se tient assis dans la lumière blonde du soir, contemplant la mer depuis le port d’Alger, ville qui a sans doute été le théâtre de sa vie.
Avec le dessin Déplacer des montagnes et les sculptures Au bord de et Des murs sur terre de Julia Gault, c’est le sol lui même, lieu de tous nos déplacements, qui devient mouvant. Elle déploie une réflexion sur la circulation des matières premières et sur leur façonnage en formes génériques, afin de construire un monde à notre image. La temporalité de la terre qu’elle manipule rappelle le provisoire de nos constructions, en provoquant en nous un vertige ; issue de la forêt de Fontainebleau, elle trouve son origine dans des fonds marin sableux aujourd’hui disparus, qui a laissé place à une forêt tentaculaire.
Comme en écho se tient un ensemble de dessins de Félix Rodriguez-Sol, intitulés La Vallée Creuse. Dans ces paysages réalisés à la mine de plomb, la trace dans les sols laissée par nos sociétés industrialisées se mêle aux multiple passages des autres formes du vivant. En changeant successivement de points de vue, à la fois proches et infiniment lointains, Félix Rodriguez-Sol procède à une lente désorientation de nos sens. En déchiffrant ces vues étranges, en suivant la sinuosité des chemins qui traversent ces paysages, les dessins de La Vallée Creuse se muent peu à peu en cartographies de nos propres labyrinthes intérieurs.
Réunies pour l’exposition Du sable et des ombres, les démarches des quatre artistes se prolongent, se croisent et tissent un réseau d’instants et de lieux faits de crépuscules et d’aurores. Au sein de ces territoires plongés dans une lumière incertaine, ils font apparaître le monde et ses reflets. Un monde fugitif, qui à la manière des vagues, se forme et se déforme inlassablement.