Comment se construire sans modèle ? Comment affirmer qui on est dans une société qui ne nous considère pas ? Une BD-voyage aussi drôle que rude dans la France hétéronormée des années 1980-90.
Séverine naît à la fin des années 1970 dans une famille ordinaire. Dans son village, quand on est une fille, on joue à la poupée et on fait de la danse ; mais la danse, c’est pas trop son truc, à Séverine. Elle, elle voudrait faire du volley comme Jeanne et Serge et du foot comme Olive et Tom. Un jour, dans la voiture des parents d’un copain, elle entend à la radio le titre de Meccano, Une femme avec une femme ; ce jour-là, elle s’enfonce dans son siège, rouge de honte. Meccano, Barbara, David Bowie, Aznavour, Mylène Farmer… Autant de petits cailloux disséminés sur sa route, qui vont donner du crédit à une idée farfelue : on peut avoir une vie respectée et digne en aimant quelqu’un du même sexe. Qui arrête les colombes en plein vol ? est le récit de la découverte d’une sexualité marginale dans le monde d’avant, celui de la culture dominante et de l’invisibilité quasi-totale des minorités. On rit beaucoup, on enrage souvent, et surtout on compatit aux difficultés infinies qu’ont eu à surmonter ceux et celles qui ne se retrouvaient pas dans la norme – tout en ignorant que cette dernière en était une.
Séverine Tales fait partie de la génération X. Après nous avoir offert des moments choisis (ou pas !) de son quotidien familial dans les Chroniques décalées d’une famille ordinaire (et vice versa), elle revient ici en images sur son enfance et son adolescence avec une sincérité désarmante que son humour inimitable n’oublie jamais de brocarder pour nous permettre d’entrevoir l’émergence de l’identité homosexuelle dans la société désespérément hétéro de la fin du XXe siècle.
Qui arrête les colombes en plein vol ?, Séverine Tales, éditions Payot Graphic, 21 €.
Parution : 14 mai 2025